Le pétrole et le gaz représentent à eux seuls 57% de l'énergie utilisée dans le monde. Or leur maximum de production pourrait être atteint dans les trois prochaines décennies, estiment les experts. J'ai discuté dans une soirée chez des voisins anglais, il y a quelques temps, avec un spécialiste de la question, expert anglais qui travaille depuis 2 ans sur les champs pétrolifères en Ukraine. Il me disait que la réalité, c'est qu'on atteindra le maximum dans seulement 15 ans, pas dans 30 ans.
Le récent conflit gazier entre l'Ukraine et la Russie, qui a affecté l'approvisionnement en gaz naturel d'une grande partie de l'Europe, pousse aussi les pays à vouloir mieux garantir leur indépendance énergétique. Certains jugent que pour l'Europe, le nucléaire est une réponse à la crise gazière. La France en tous cas y est résolumment engagée. Blair est favorable à une relance du programme nucléaire. Même en Allemagne, pays traditionnellement opposé au nucléaire, le débat est réapparu à l'occasion de la crise Russo-Ukrainienne, l'Allemagne étant fortement dépendante du gaz aujourd'hui. Partout ailleurs, en Chine, au Brézil, en Afrique du Sud... les milliards tombent sur la table pour développer le nucléaire.
Par ailleurs, l'épuisement des ressources fossiles, qui en fait une arme stratégique pour les pays producteurs, n'est pas le seul enjeu de ce siècle : le monde doit aussi trouver une solution au réchauffement climatique. Pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre, le nucléaire est une partie de la réponse. De plus, les réserves d'uranium peuvent assurer jusqu'à 80 ans de consommation au rythme actuel et le coût final de l'électricité d'origine nucléaire est peu dépendant du prix du combustible.
Cruel dilemme écologiste : les énergies fossiles bouleversent et mettent en danger la planète, notamment par voie d'effet de serre, mais le nucléaire, c'est dangereux et ce n'est pas très propre, la question des déchets restant cruciale. En même temps, il est absolument illusoire de penser que les énergies propres et renouvelables puissent répondre à la demande des 50 prochaines années. Certes, il faut réduire nos dépenses énergétiques de toute manière, gaspiller moins. Mais, encore une fois, il n'y aura pas de solution miracle. Il nous faudra faire des compromis, et accepter le nucléaire comme "moins mauvaise" solution que les énergies fossiles.
Ce compromis génère cependant une question géostratégique majeure : du nucléaire civil au nucléaire militaire, il y a une distance pas si difficile que ça à franchir. On en voit tout la problématique dans le cas Iranien en ce moment. Question : est-il légitime, pour tous les pays, d'accéder à l'indépendance énergétique ? La réponse est oui. Ne pas le faire, c'est non seulement moralement injustifiable, mais c'est aussi condamner trop de monde au sous-développement par dépendance économique, à la rancoeur contre les pays riches "nucléarisés", à perpétuer les flux migratoires vers les pays riches au détriment du développement local, à susciter les vocations terroristes, etc. Mais comment éviter alors la prolifération nucléaire à vocation militaire ?
Question Onusienne, et idée, lancée comme ça : les pays riches nucléarisés aideraient les pays pauvres, technologiquement et financièrement, à développer rapidemment leur indépendance énergétique par la mise en place des infrastructures nucléaires civiles, accompagnées d'un quota d'implantations d'énergies renouvelables ; le tout en contrepartie d'un cahier des charges extrêmement précis.
- état démocratique avéré, ou processus de démocratisation simultanné, avec des contraintes précises en matière de droits de l'homme, indépendance de la justice, et droits des femmes
- interdiction totale de développer l'arme nucléaire, en acceptant les principes de contrôles draconniens
Bon, je rêve un peu sans doute, mais il faudra pourtant bien trouver des solutions.
BC