Le blog du CTD, par Bertrand Damien


Chers CTDistes, chers amis, bienvenue sur le blog du CTD. Humeurs, billets d'actualité, coups de coeurs et de bourre, ou simplement plaisantes conneries du 1 au 10ème degré.

Nom : Bertrand
Lieu : France

Musicien, compositeur, auteur, et Producteur de musique (label ESP Music). J'ai travaillé 20 ans dans l'industrie des télécommunications, et j'étais encore récemment Directeur d'un département de conseil en stratégie pour les opérateurs. Maintenant, musique...

31.5.07

Pourquoi Toyota n'est pas français

Je reprends en intégralité ici ce billet paru dans Le Monde, et qui m'a été envoyé par email aujourd'hui. Je suis en tous points d'accord avec l'auteur, cet article synthétise une bonne partie de ma propre expérience et de mes réflexions sur le sujet de l'Entreprise, en France.


De deux événements quasi simultanés - la victoire de Nicolas Sarkozy à l'élection présidentielle et le déclassement de General Motors au profit de Toyota comme premier constructeur automobile mondial -, l'histoire jugera quel est le plus important. Néanmoins, la question essentielle autour de laquelle devraient tourner les entretiens du président de la République avec les partenaires sociaux est bien celle-ci : pourquoi la France est-elle incapable de donner naissance à un leader mondial comme Toyota ? Apporter une réponse collective à cette interrogation permettrait de résoudre une grande partie des blocages français.

Le succès du constructeur japonais offre en effet un contraste saisissant avec nos entreprises. Non que certaines soient incapables d'être des leaders mondiaux, mais le management de Toyota à l'origine de sa réussite est - malheureusement - aux antipodes des pratiques françaises. Un groupe japonais ne vend pas près de dix millions de véhicules chaque année, dont trois millions en Amérique du Nord, par hasard. Pour atteindre les deux objectifs fixés dès les années 1950 - l'organisation en flux tendus et l'amélioration permanente -, les dirigeants de Toyota ont mis en oeuvre trois principes essentiels : le développement personnel des salariés, la lutte permanente contre le gaspillage et la capacité de chacun à résoudre les problèmes et à participer à l'amélioration des produits (Le Modèle Toyota, de Jeffrey Liker, Village mondial, 2006).

Copié par la plupart des multinationales depuis les années 1980, l'ex-fabricant de métiers à tisser n'a jamais été égalé. De l'avis général, il dispose aujourd'hui d'une longueur d'avance dans la plupart des domaines, notamment la technologie hybride (double motorisation essence et électricité). Si Toyota prend des parts de marché à ses concurrents américains et européens, ce n'est donc pas parce qu'il serait subventionné ou qu'il exploiterait ses ouvriers de manière éhontée - le japonais semble très heureux d'avoir ouvert une usine à Valenciennes malgré les 35 heures -, mais parce que son organisation du travail et son système de relations sociales lui permettent de proposer de meilleures voitures. C'est là que la comparaison avec la France est cruelle. Même si les études internationales dans ce domaine sont aléatoires, tout indique que l'archaïsme des relations sociales en France a un impact direct sur l'organisation et donc les conditions de travail puis, in fine, sur la performance des entreprises.

Comme le démontre l'économiste Thomas Philippon dans un essai très stimulant, Le Capitalisme d'héritiers (Seuil, 110 p., 10,50 €), les Français n'ont aucune allergie particulière au travail. Au contraire, ils sont, dans les pays développés, parmi ceux pour qui le travail est le plus important. De même, nombre d'entre eux jugent important d'apprendre à leurs enfants à " travailler dur ". Si cette thèse est exacte, le diagnostic de Nicolas Sarkozy serait faux : il n'y aurait pas de crise de la valeur travail. En revanche, les Français, explique Thomas Philippon, ne parviennent pas à travailler ensemble. " La mauvaise qualité des relations sociales en France est une caractéristique qui ressort de toutes les enquêtes disponibles, et ce de manière durable ", écrit-il. Une étude réalisée en 2003 pour la Commission européenne le confirme : 50 % des Français interrogés pensent qu'" il y a beaucoup de tensions entre les salariés et le management dans leur pays ", un record dans l'Europe des Quinze, hormis la Grèce.

De même, toujours à l'exception de la Grèce, la France se classerait dernière en Europe pour " la liberté de prendre des décisions dans son travail ". L'anti-Toyota en quelque sorte ! Certains attribueront ce climat aux directions des grands groupes. Pour M. Philippon, le fait qu'un grand nombre d'entreprises soient dirigées par des " héritiers " (au sens patrimonial ou sociologique par le biais des grands corps de l'Etat) explique, en grande partie, le manque de confiance généralisé dans les sociétés françaises.

LE TRAVAIL RESSENTI COMME SOUFFRANCE

D'autres mettront en avant le rôle négatif des syndicats, dont certains considèrent toujours le profit comme illégitime et se méfient de la liberté laissée aux salariés, stade ultime de l'exploitation capitaliste ! Peu importe : le travail est toujours ressenti comme une souffrance. Et les conditions de travail ont tendance à se dégrader. Selon l'enquête menée tous les dix ans par le ministère du travail, entre 1994 et 2003 " l'exposition des salariés à la plupart des risques et pénibilités du travail a eu tendance à s'accroître ". Les journées de travail sont moins longues, mais les contraintes organisationnelles et les pénibilités physiques augmentent. Au nom de la défense de l'emploi, les syndicats ont longtemps hésité avant de faire de l'amélioration des conditions de travail une véritable priorité. Les récents suicides chez Renault ont montré qu'un certain nombre de représentants du personnel étaient aussi mal à l'aise que la direction face à ce phénomène.

Pour le patronat, l'amélioration des conditions de travail est trop souvent vue comme un coût supplémentaire, et l'idée qu'un subordonné puisse avoir de meilleures idées que son supérieur est contraire à notre " logique de l'honneur ". Du coup, toute négociation sur ce thème s'enlise. Un signe ne trompe pas. Depuis vingt-cinq ans, un institut américain, Great Place to Work, sonde des dizaines de milliers de salariés pour classer les entreprises où il fait bon vivre. Depuis quelques années, l'institut élargit ses enquêtes à l'Europe dans les entreprises qui se portent volontaires. Dans la plupart des pays, l'institut a été obligé de limiter la participation à deux cents entreprises. En France, une soixantaine seulement se sont portées candidates. Conséquence : aucune entreprise française - à l'exception de quelques filiales de groupes américains - ne figure dans le Top 100 des entreprises où il fait bon travailler en Europe.

On peut traiter par le mépris ce genre de classement. Mais, dans la compétition mondiale, les groupes n'ont que deux façons de s'en sortir : offrir les mêmes biens ou services que leurs concurrents à un prix moins élevé ou en proposer de nouveaux. A moins de délocaliser la production dans un pays émergent, la première voie est vouée à l'échec. Reste la seconde : innover. Sauf à y consacrer des sommes folles, les entreprises ne peuvent que compter sur leurs salariés. Or, sans motivation, pas d'innovation. Proposer aux salariés, volontaires, de travailler davantage a sans doute été politiquement payant pour M. Sarkozy. Mais la vraie rupture consisterait à les faire travailler plus intelligemment. Un défi qui, c'est vrai, ne saurait passer par un simple texte de loi.

Frédéric Lemaître

24.5.07

Sarkolusconi

Je me suis foutu de la gueule (et j'ai plains en même temps) des Italiens pendant des années devant les dérapages démocratiques incroyables de l'ère Berlusconi. Je n'aurais jamais crû qu'en France, on en soit si près.

Après le coup du Yacht Bernarnolusconi, on rentre vraiment maintenant dans le vif du sujet. Pour finir, une fois que l'UMP aura atomisé les législatives, la France va vraiment devenir une République bananière.

Je recopie ci-joint un communiqué AFP intégral.

PARIS (AFP) - L'ex-juge d'instruction Eva Joly a estimé jeudi que l'état de la démocratie en France était "plutôt inquiétant", dénonçant notamment les "conditions berlusconiennes" de la nomination d'un proche de Nicolas Sarkozy à la direction de TF1, "machine de guerre pour la propagande".
"La démocratie ce n'est pas invoquer Jaurès ou Blum, la démocratie c'est des institutions qui fonctionnent et c'est la confiance dans les institutions", a déclaré sur RTL l'ancienne magistrate de l'affaire Elf. "Une démocratie ça se mesure à sa presse indépendante et à sa justice indépendante et je trouve que ce que nous voyons en France est plutôt inquiétant", a-t-elle ajouté.

"Nous voyons un président de la République qui fête sa victoire d'élection avec Martin Bouygues (président du groupe) et qui téléphone le 8 mai à Omar Bongo (président gabonais, au pouvoir depuis 1967, il a instauré un régime de parti unique de 1968 à 1990, ndlr) pour le remercier de ses bons conseils et qui ensuite, le 22 mai, nomme son directeur adjoint de campagne (Laurent Solly), directeur adjoint de TF1", a relevé Eva Joly.

L'ancienne magistrate s'est offusquée de ce "mélange des genres" d'autant que la nomination de M. Solly a "été annoncée par l'Elysée". "Pour moi c'était une violation d'une règle fondamentale en démocratie", a souligné l'ancienne magistrate franco-norvégienne, devenue conseillère spéciale du gouvernement norvégien contre la corruption et le blanchiment. TF1, "qui a jusqu'à 50% de parts de marché en France", est "vraiment une machine de guerre pour la propagande", a-t-elle dénoncé.

"Cela me paraît des conditions assez berlusconiennes et je souhaite mieux pour mon pays", a aussi déclaré Eva Joly.

11.5.07

Epilogue

Encore un peu de poésie dans ce monde de brutes.

Epilogue est... l'épilogue du livre de poésie (A Journey to My Space - Un voyage dans mon espace), que je viens juste de terminer. Il est mon premier ouvrage bilingue, tous les poèmes étant en anglais et en français. Une première édition est encours de fab aux US, pour mes lecteurs "internationaux" qui me suivent depuis plusieurs mois sur myspace.com, le livre sera disponible sur amazone.com.

Voici donc Epilogue, dans sa version française...

Dimanche 22 avril 2007

Je t’ai découverte ainsi, tu m’attendais, il me semble que c’était hier et pourtant les jours ont passé. Mes mots d’amour pour toi faisaient des petits trous dans le grand mouchoir du ciel qui, aussitôt éclos, doucement se refermaient comme des corolles de fleurs à la fin du jour. Je continue encore d’ensemencer cet azur et je me demande si un jour il en naîtra des fleurs odorantes, ou peut-être de grandes herbes sauvages, des petits buissons éphémères, ou de grands hortensias aux exubérants bleus pastels. Nulle empreinte, nulle cicatrice, seul le souvenir de ta peau, sous l’empire fécond de nos désirs lâchés dans les herbes folles, petit troupeau rieur et joueur de jolies gazelles bondissantes, avant que lions et lionnes ne rugissent. Mon écorce se fendille, tes doigts effilés pèlent et dénudent mon tronc qui se met à saigner de sa sève blanche. Mélangé à ton lait jasmin, oh ma douceur enivrante, tu en feras un baume pour nos plaies. Ta jarre simple et précieuse à mes pieds, tu laves les poussières de ma longue attente dans le vent aveugle à mes prières ; toi, souple ruisseau qui murmure à mon oreille et baigne mes bras noués de ce frisson liquide et presque douloureux. Je frémis dans l’air immobile car j’attends ton baiser, celui qui me brûle et me noie à la fois, cet impossible mélange du feu et de l’eau, que tu conjures pourtant chaque jour pour me consacrer. Ta langue prend mon sel et n’en laisse rien ; je repartirai encore en quête pour toi, de ces petits grains de folie que je cueille dans le zéphyr. Je tendrais encore le filet de ma dévotion entre mes branches les plus solides, ce feuillage tissé de mon patient labeur amoureux. Je prie lorsque vient chaque nuit pour que le vent de l’aube ne m’abandonne pas ; qu’un jour de plus je puisse te nourrir, et qu’un autre encore, et encore. Peut-être verras-tu alors mon automne, et mes feuilles tomber, et tu sauras que je t’aurais aimé, jusqu’à la fin.




Ha, au fait, j'ai réactivé les commentaires sur ce blog... N'hésitez pas.

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8.5.07

Symbole et message d'espoir

Sarko sur son Yacht à 198 000 euros la semaine de location.
Quelle magnifique image, et message, envoyé aux français, pour bien inaugurer son quinquennat.

Bien sûr, il n'a pas payé. C'est son ami Vincent Bolloré qui est propriétaire du bateau via quelque société écran (sources journalistiques de France 2). Le genre de cadeau d'ami qu'il faut accepter vite avant d'entrer en fonctions, parce qu'une fois président, ce genre d'abus, ça va faire passer les frais de bouche de Chirac pour de la mauvaise laitue de Rungis.

C'est ça le changement en effet. Changement d'échelle dans la provocation.

Quoique, c'est peut-être simplement la fin des tabous français sur la posture ultra-libérale à l'américaine. Car, en fin de compte, quel est le message ici envoyé aux français ? Un message d'espoir bien sûr ! Enfin, en France, tout est possible, pourvu que vous le vouliez et vous battiez assez pour ! Libérons les énergies ! Faites ce que vous voulez, il n'y a plus de cette vieille morale sociale-démocrate et humaniste d'une vieille république rendue aux rencards. Voici venu le temps du far-west !

Peu importe que ce soit un mirage aux allouettes et un mythe, car beaucoup de candidats à la loterie libérale, et peu d'élus. Comme disait Michel Omfray dans son blog suite à l'hallucinant rendez-vous organisé avec Sarkozy par Philosophie Magazine (à lire ici), l'homme de droite qu'est Sarkozy pense que tout individu peut arriver au succès si on le libère de toute chaîne et de toute règle; que l'origine sociale, les réseaux, l'éducation, les moyens, tout cela ne compte pas; seul l'homme, individu désincarné de la société et de la communauté, est maître de son destin.

Comment ce type peut-il comprendre qu'à diplômes et compétences égales, un Kadher aura 10 fois plus de difficultés à trouver un job qu'un Martin-Dupont ? Non, c'est comme la pédophilie, pour Sarkozy, c'est génétique. Vous êtes programmés par vos talents innés, et ainsi vous réussirez ou non, car dans son univers ultra-libéral, tout devient possible (sans les arabes, les gens de gauche, les noirs, sans Thuram ou Noah, etc, comme disait l'affiche détournée que vous avez sûrement reçue plusieurs fois). Tout devient possible, comme d'afficher sa promiscuité avec les plus riches, en recevant leurs cadeaux à 198 000 euros la semaine. Comme a dit Sarkozy lui-même à Omfray (lisez l'article cité plus haut), "si vous me faites un cadeau, je dois vous en faire un en retour". C'est quoi le cadeau prévu pour Bolloré ?

Non Sarkozy ne sera pas le président de tous les français, qu'ils se lèvent tôt ou pas. Sarkozy sera le président de ceux qui arriveront à tirer les marrons du feu, quel que soit les dommages collatéraux et tant pis pour ceux qui n'auront même pas un pouième de chance de s'approcher des marrons, quelle que soit leur volonté et leur talent. Qu'ils vivent au fin fond du trou du cul du monde, ou qu'ils s'appellent Jean Al Zaoui, ou qu'ils n'aient pas leur carte UMP et un bon réseau de relations à Neuilly, ce n'est pas la question leur dit Sarkozy. Regardez-vous dans la glace et dites-vous tous les matins "je serais Président de la République française", et le tour est joué ! A vous les yachts de milliardaires !

Tel est le message d'espoir que nous a envoyé Sarkozy, à l'aube de son quinquennat.

Ca, pour du changement, c'est du changement. C'est la fin de la pudeur républicaine.

7.5.07

Métaphore graminée

Les français aiment manger du foin, ils pensent toujours que l'herbe est plus verte ailleurs, mais quand ils commenceront à recevoir leur ration d'herbe dessechée, ils n'auront que ce qu'ils auront mérité. Je pense que ça va constiper assez vite, de la Sarkodomie sans vaseline, et que ça finira par du crotin dans la rue, beaucoup, partout.

Quand aux pachidermes de services, il faudra bientôt leur prévoir une réserve naturelle dans la savane desséchée, pour cause de sécheresse aggravée par le piétinement lourdingue des-dits pachidermes, dévastant ce qui reste des herbes folles sans OGM devenues rares.

Et la gazelle, elle est où la gazelle ? Elle a commencé la migration vers les verts paturages Béarnais, car c'est le Printemps et l'eau de la Montagne est fraîche. Attention à l'hiver cependant, la neige est froide pour les gazelles...

6.5.07

L'heure de la sociale démocratie française

Voilà, les votes ont parlé. La machine Sarko a percuté, et les Français sont donc prêts à manger du foin. Je ne les plains pas, ils doivent assumer, et on les verra massivement dans la rue avant 2 ans.

Ce soir, nous avons vu que le principal impact du troisième échec consécutif de la gauche aux élections présidentielles est la mort programmée du PS en sa forme actuelle, ainsi que de la gauche traditionnelle "bloc contre bloc". Les Fabius et Emmanuelli, fossoyeurs de la gauche unie par leur NON référendaire à l'Europe, sont politiquement morts, voués à l'alliance moribonde avec la gauche de la gauche.

La défaite est en effet l'occasion rêvée (voire attendue par certains ?) de recomposer l'espace politique français en inventant, à l'instar d'autres vieilles démocraties européennes, un parti social-démocrate de centre-gauche. Les discours de Ségo et DSK ne parlaient que de ça. Bayrou il y a quelques instants aussi.

Nous y voilà donc, et les trois acteurs majeurs de ce changement se sont tous déclarés candidats à diriger cette recomposition. Personnellement, je l'appelle de mes voeux, pour enfin trouver en politique française quelque chose qui reflète mes convictions plus largement que ce que le PS me proposait jusqu'à aujourd'hui.

Mais on voit là aussi le premier obstacle majeur : aucun personnage ne s'impose pour en diriger la naissance, quand des Chirac ou des Mitterrands disposaient de l'autorité et de la domination nécessaires pour inventer qui le RPR, qui le PS post SFIO. Là, nous avons DSK, Royal, et Bayrou, et ils vont tous revendiquer le leadership. Ca va être une drôle de foire d'empoigne... Je n'ai pas de pronostic. Tout ce que je sais, c'est qu'il faut que ça se fasse.